L’expérience de Renault en Amérique
Dès 1906, les Renault les plus luxueuses sont vendues aux États-Unis grâce à la renommée mondiale du constructeur. Après la seconde Guerre Mondiale, la marque, devenue Régie Nationale, va changer de registre en proposant des modèles plus populaires. L’aventure de Renault en Amérique est alors lancée.
La création d’une filiale Américaine
Ainsi la petite 4CV débarque outre-Atlantique en 1948. Sans véritable réseau, ni service après-vente, les volumes restent très limités. Ne tirant pas véritablement les enseignements de cette première expérience en matière d’habitudes du client américain, Renault établit pourtant dès 1951 une filiale en charge de vendre le plus de voitures possibles afin de faire rentrer des devises dans le pays conformément à la demande du gouvernement français. À partir de 1957, les Dauphines commencent à arriver en nombre aux États-Unis. Les ventes frôlent les 100 000 exemplaires pour la seule année 1959, ce qui correspond à près de 20 % de la production totale du constructeur cette année-là. Malheureusement, le succès commercial tourne vite à la catastrophe compte tenu de la piètre qualité des voitures et aussi d’une absence patente de service après-vente avec notamment un stock de pièces détachées digne de ce nom. Renault a donc tout misé sur les ventes avec une publicité agressive mais sans se préoccuper le moins du monde de la satisfaction du client final. Le retour de manivelle est violent d’autant qu’au même moment, Volkswagen parvient à vendre toujours plus de Coccinelle sur le sol américain, une auto comparable à la Dauphine au niveau des prestations, quoiqu’un peu moins chic, et ce grâce à un niveau élevé de fiabilité et de service.
Des résultats en demi-teinte
Par conséquent, Renault va traverser de manière fort discrète la décennie 60 sur le continent nord-américain. Les coupés et cabriolets Caravelle – dénomination de la Floride aux États-Unis – sont proposés à partir du millésime 1960, tandis que la 4CV poursuit sa discrète carrière jusqu’en 1961. La Renault 8 vient compléter la gamme à partir de 1962. Pour le millésime 1967, les Dauphine, Caravelle et R8 disparaissent du catalogue pour laisser place à la nouvelle Renault 10 qui permet un léger rebond des ventes, celles-ci dépassant à nouveau la barre des 20 000 unités annuelles. Deux ans plus tard, l’originale Renault 16 est ajoutée au catalogue en étant vendue sous l’appellation sedan-wagon c’est-à-dire berline-break, en référence à son hayon arrière et à sa banquette arrière modulable. En 1971, la Renault 12, disponible en berline et break, succède à la Renault 10, puis les coupés 15 et 17 sont commercialisés à partir de 1972, au moment où la Renault 16 quitte à son tour le catalogue. Les ventes se mettent alors à chuter jusqu’à moins de 6000 exemplaires en 1975.
Renault se décide alors à reprendre les choses en main en présentant en octobre 1975 la version US de la Renault 5. Agacée par le succès de la Honda Civic et de la Volkswagen Golf, la Régie comprend qu’il existe des clients amateurs de petites voitures pratiques et sûres au pays des paquebots sur roues ! La nouvelle venue est accueillie favorablement par la presse et par le public ce qui assure une nouvelle croissance des ventes du constructeur français sur le marché américain. En 1980, la barre des 25 000 voitures vendues est franchie grâce à la Renault 5, rebaptisée localement Le Car (la voiture sic) depuis le millésime 1977. Ce modèle est rejoint par la Renault 18 à l’occasion du millésime 1981, tandis que les 12, 15 et 17 ont quitté la scène respectivement en 1977, 1976 et 1979. En septembre 1981, le coupé Fuego arrive outre-Atlantique. Les ventes américaines de Renault dépassent alors les 30 000 unités en 1981, un chiffre à comparer aux plus de 80 000 Volkswagen et au plus de 370 000 (!) Honda vendues la même année. Les traces du cuisant échec de la fin des années 1950 persistent. Mais les choses vont changer !
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Le partenariat avec AMC et les nouveaux projets de Renault en Amérique
Coopérant avec le 4e constructeur américain AMC depuis 1961, Renault signe un accord commercial en mars 1978 lui permettant de bénéficier du réseau de distribution d’AMC, avant de prendre une participation de 5 % dans le capital en janvier 1979, qui est portée à 46,4 % en septembre 1980. AMC connaît alors des difficultés financières en raison d’une gamme peu attrayante, excepté les modèles Jeep, une marque dans l’escarcelle du constructeur américain depuis 1970. Renault investit alors massivement dans l’usine de Kenosha, appartenant à AMC, pour y produire la version américaine de la prochaine Renault 9 sous l’appellation Alliance. En juin 1982, ce nouveau modèle fait ses débuts sur le marché américain. Le succès est immédiat et l’objectif annuel de 100 000 ventes est atteint avec trois mois d’avance. Au millésime 1984, la Renault 5 disparaît du catalogue, tandis que la nouvelle Encore (variante américaine de la Renault 11) devient disponible et que la 18 n’est plus proposée qu’en version break. En septembre 1984, le coupé Fuego cède la place au cabriolet Alliance. Les ventes restent florissantes et Renault semble alors bien parti pour, enfin, se faire une place outre-Atlantique.
Les projets visent alors à l’élargissement de la gamme par le haut dans les segments compact et intermédiaire avec des berlines (Medallion et Premier), des breaks (Medallion et Premier), un coupé (Allure) et des versions adaptées de l’Espace et de l’Alpine GTA. La construction d’une nouvelle usine au Canada débute pour permettre la production de la future Premier, un modèle inédit réutilisant la plate-forme de la Renault 21 et des éléments de la Renault 25. Tout semble donc aller pour le mieux mais les ventes se mettent à fléchir sérieusement en 1985 et reculent encore plus en 1986. Les Alliance et Encore ne séduisent plus le client américain en raison d’une conjoncture économique plus favorable qui pousse les consommateurs à acheter à nouveau de plus grosses voitures, de la concurrence dynamique des constructeurs japonais qui renouvellent leur gamme à la vitesse grand V, mais aussi et encore une fois, de problèmes de qualité. Les retouches et améliorations apportées aux millésimes 1986 et 1987 ne parviennent par à changer la situation. Le break Renault 18 est supprimé du catalogue américain à la fin du millésime 1986.
Une situation en France très compliquée
En France, la situation du groupe Renault devient critique et les pertes financières s’accumulent. Des contacts sont donc pris avec Chrysler courant 1986 pour lui céder les opérations nord-américaines de la Régie, qui incluent les marques AMC et Jeep, les modèles Renault spécifiques à ce marché et les usines correspondantes. En février 1987, l’aventure américaine paraît encore se poursuivre avec la présentation des Medallion berline et break, versions US de la Renault 21 importées depuis la France, et de la Premier, une berline inédite destinée à être produite dans la nouvelle usine canadienne. Pourtant le 9 mars 1987, la nouvelle tombe : Renault se retire du marché américain et transfère à Chrysler l’ensemble de ces activités en Amérique du Nord. En juin 1987, la production de toutes les versions de la Renault Alliance est stoppée : plus de 620 000 voitures auront été fabriquées aux États-Unis entre 1983 et 1987 (80 % l’ayant été entre 1983 et 1985). Les ventes de la Medallion sous la marque Renault s’achèvent à la fin du millésime 1987, même si elles vont se poursuivre jusqu’en 1990 sous la marque Eagle au terme des accords conclus avec Chrysler. Quant à la Renault Premier, sa carrière démarre durant l’été 1987 pour le millésime 1988 sous l’appellation Eagle Premier. Les 190 premiers exemplaires produits avec le logo Renault ont été rebadgés et vendus sous la marque Eagle.
À partir du millésime 1990, l’Eagle Premier est épaulée par un modèle jumeau, la Dodge Monaco. Les ventes restent cependant relativement faibles, Chrysler n’ayant guère de motivation à vendre cette voiture conçue par Renault. La production des Premier et Monaco est arrêtée en décembre 1991 après qu’un peu plus de 139 000 unités aient été fabriquées depuis 1987.
A suivre …
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