Paul Bracq : Designer français aux influences allemandes
Que partage la carrosserie de la Mercedes SL « Pagode » des années 1960 et celle du coupé BMW Série 6 (E24) des années 1970 et 1980 ? Et bien, ces deux autos sont l’œuvre d’un styliste français de renom : Paul Bracq. Peu connu de nom mais incontournable par l’empreinte laissée, nous lui devons quelques modèles mythiques.
Né à Bordeaux en 1933, cet artiste termine ses études au sein de l’École Boulle, située à Paris, en 1953. Après que son travail ait été mis en valeur dans le magazine l’Automobile, il travaille pour le styliste Philippe Charbonneaux pendant une année au cours de laquelle il contribue à plusieurs projets de carrosserie sur des voitures de différentes marques. L’année suivante est celle du service militaire qu’il effectue en Allemagne. Paul Bracq réalise alors que les perspectives de carrière apparaissent plus intéressantes chez les constructeurs automobiles haut de gamme de ce côté-ci du Rhin, tandis que leurs homologues français disparaissent les uns après les autres : Bugatti, Delage, Delahaye et Talbot.
Le départ pour l’Allemagne
C’est ainsi que Paul Bracq commence à travailler chez Mercedes en 1957. Il est placé sous la direction de Karl Wilfert au sein du bureau de style de la marque. Ces premiers travaux concernent des éléments de carrosserie tels que des feux. Puis il œuvre activement à la création de deux modèles emblématiques pour les amateurs de voitures de collection : la 230 SL et la 600, toutes deux présentées en 1963. La première, connue aussi sous le nom de « Pagode », en raison de la forme de son pavillon, remplace la 190 SL mais aussi la fameuse 300 SL. Elle évolue en 250 SL en 1967, puis en 280 SL en 1968, avant de céder la place, en 1971, à la 350 SL de la nouvelle génération R107. Quant à la 600, cette limousine à moteur V8 6.3, connaît une carrière qui ne s’achève qu’en 1981, après avoir conduit de nombreux chefs d’États et de riches industriels. Paul Bracq est aussi à l’origine des berlines 250 S et 250 SE(W108) et 300 SEL (W109) lancées en 1965, et des berlines 200-280 (W115-114) commercialisées à partir de 1968. Mais la lenteur de l’évolution de sa carrière chez Mercedes, conjuguée à une certaine impatience, le conduit à quitter le constructeur allemand en 1967 pour revenir en France.
Une influence majeure Outre-Rhin
Il travaille alors pour Brissonneau et Lotz qui fabrique les carrosseries des Matra 530 et Opel GT. L’entreprise reçoit alors une commande de la part de BMW mais qui n’aboutit pas suite au dépôt de bilan du carrossier français. Toutefois, les contacts pris avec BMW permettent à Paul Bracq de rejoindre la marque en 1969 pour y devenir le responsable du centre de style. Il réalise le prototype Turbo, présenté en 1972 à l’occasion des Jeux Olympiques, qui se tiennent à Munich. Mais Bracq supervise surtout la création de la nouvelle gamme BMW déclinée sous forme de Série : la Série 5 (E12) présentée en 1972 puis la Série 3 (E21) dévoilée en 1975, suivie par les Série 6 (E24) et Série 7 (E23) lancées respectivement en 1976 et 1977.
Fin de carrière chez Peugeot
Pourtant, le styliste français n’assiste pas au lancement des Série 3, 6 et 7. En effet, il quitte BMW dès 1974 pour se voir confier la direction du style intérieur chez Peugeot. Les intérieurs des 305, 505, 205, 405, 106 et 406 sont créés sous sa responsabilité, tout comme ceux des prototypes Quasar, Proxima et Oxia présentés au salon de Paris en 1984, 1986 et 1988. Chez Peugeot, le style extérieur est alors dirigé par Gérard Welter. Cette organisation permet au constructeur de Sochaux de réduire sa dépendance à l’égard du carrossier italien Pininfarina en ayant un département de style interne plus efficace. Cette situation avec le duo Welter pour l’extérieur et Bracq pour l’intérieur perdure jusqu’en 1994, année où le jeune designer turc, Murat Günak, vient chapeauter les deux hommes en prenant la direction du centre de style chez Peugeot. Cette situation gêne quelque peu Paul Bracq qui part en retraite en 1996.
Le maestro s’occupe alors à plein temps de dessiner, peindre et sculpter des voitures, des activités que l’artiste a toujours accomplies tout au long de sa carrière. En hommage à son père et à deux de ses œuvres automobiles, la Mercedes SL « Pagode » et la Mercedes 600, Boris Bracq, son fils né en 1970, fonde Les Ateliers Paul Bracq à Bordeaux en 2013 pour entretenir et restaurer ces deux modèles. La passion a bien été transmise et se poursuit avec force.
Une référence pour les amoureux de véhicules anciens ;)
A lire : Les avantages et les inconvénients d’une carte grise de collection
A suivre …